1h… cela faisait 1h que j’attendais ce type avec qui j’avais gâché pratiquement 8 ans de ma vie. En y repensant, dès le début, ça n’avait pas si bien fonctionné. On s’était rencontrés lors d’une consultation de kinésithérapie où il était venu pour faire soigner son dos endolori par des séances intensives de surf, m’avait-il dit. J’avais appris, à la soirée de mon propre mariage, qu’il s’était bloqué les lombaires suite à une partie de Twister coquin. Cela m’avait fait rire sur le moment. C’était beaucoup moins drôle quand j’ai su qu’il s’adonnait aussi à ces parties pendant nos années de mariage.
Croyez-moi, commencer une relation avec un homme menteur, ça ne colle jamais très bien. Ce qui m’avait plus chez lui ? Honnêtement, c’était avant tout son physique. Corps de rêve, peau douce et hâlée, muscles en béton et cheveux blonds, ni trop longs, ni trop courts, pour pouvoir les agripper aux moments adéquats. Ma famille, qui souvent n’approuvait pas mes fréquentations, avait tout de suite accepté Riley pensant que c’était quelqu’un de bien. Moi aussi.
Tout a commencé très vite dans notre relation : la passion, le mariage, la vie commune, le désaccord. Fort heureusement, ou malheureusement pour moi, il n’y avait pas eu d’enfant. Il m’avait fait comprendre, après le mariage, qu’il n’en voudrait pas. Beau-parleur et menteur, il m’avait vendu du rêve. Par contre, le divorce, lui, traîne, comme le prouve mon attente interminable dans cette salle de réunion sans âme, dans un building sans âme de Los Angeles avec mon avocat mal peigné. Riley n’a jamais été très ponctuel.
Ma vie amoureuse a toujours été chaotique. J’ai toujours été du genre à me tromper sur les gens et aussi à tomber sur les mauvais garçons. Déjà petite, celui que je prenais pour un gentil garçon, qui me donnait ses gâteaux, était en fait la brute de la récré. Il volait les Oreo des autres gamins et me les donnaient jusqu’au jour où il a décrété que je ne méritais plus sa protection. Il m’a laissé tomber pour une autre gamine avec de plus jolies pinces à cheveux que moi.
Toute ma vie sentimentale a été du même acabit : tomber sur des arnaqueurs. Maintenant que j’y pense, plus le temps passait, plus les ruptures, et surtout les raisons de celles-ci, devenaient plus dures et malheureuses. J’avais été victime d’un pari perdu, utilisée pour avoir une bonne note à un examen ou encore « parce que, tu vois, on n’est pas assortis ». Oui, ce genre d’excuse existe …
Cependant, de tous ces désastres amoureux, il y en a un qui aurait pu bien finir. J’avais eu le temps d’y penser pendant ces années de mariage gaspillées. J’avais 19 ans et moins de rides. Il s’appelait Aaron et c’était, selon mes parents, ma pire fréquentation. Moi, j’étais folle de lui et j’aime à penser que c’était réciproque.
Aaron était l’unique enfant d’une famille déstructurée. Il avait été trimballé d’un bout à l’autre de la planète. A 20 ans, il devait avoir plus de miles au compteur qu’une vielle Mustang. Quand j’ai fait sa connaissance au café dans lequel je bossais, il était sur Los Angeles depuis 6 mois. Il arborait une confiance en lui et une assurance débordante.
Je me rappellerais toujours de cette rencontre. Comme dans les films : au ralenti, avec du vent dans les cheveux, de la sueur et du soleil. Je travaillais dans un café de bord de plage à Manhattan Beach. Cette année-là, nous avions eu un record de chaleur. La température était montée jusque 40°. J’étais en nage à force me battre avec le percolateur, alors même que des ventilateurs avaient été installés en plus de la climatisation. Mais tout s’était arrêté quand je l’ai vu arriver. C’était comme dans Big Fish quand Ed Bloom rencontre Sandra pour la première fois et dit que «lorsque l’on rencontre l’amour de sa vie, le temps s’arrête ». C’était le cas quand j’ai rencontré Aaron.
Il est arrivé dans le café en bermuda, marcel blanc trempé de sueur et tongs. Pas vraiment glamour mais terriblement sexy. Il avait un piercing à l’arcade et des tatouages sur le bras. « Un vrai sale gosse » disait mon père, à cheval sur ses principes. Je l’avais déjà vu une ou deux fois mais, même s’il ne m’avait pas laissée indifférente, je n’en étais pas folle pour autant. A partir du moment où il a franchi la porte du café, nous avions passé un été magnifique rythmé entre rébellion avec mes parents stricts et interdit bravés avec Aaron.
J’aime me dire que je lui plaisais aussi car, même s’il était dur avec les autres, il s’arrangeait toujours pour être doux avec moi. Il ne fumait jamais devant moi, même ses joints, il faisait ses combines dans mon dos et m’aidait toujours à réviser. Pour tout dire, il était du genre à ne rien faire et à tout réussir. Il détestait ça et faisait tout pour passer pour un cancre, un mauvais garçon.
– Madame Hart ? me dit mon avocat mal peigné en me sortant de ma rêverie. Votre futur ex-époux et son nouvel avocat arrivent. L’ancien a certainement dû en avoir marre de Riley.
C’était bizarre mais contrairement à nos confrontations habituelles, je n’étais pas énervée. Sans être vraiment sereine, j’avais l’intuition que ça allait bien se passer. Ce nouvel avocat frappa deux fois. Il ouvrit la porte et s’arrêta net. Mon cœur fit un bond. Il était beau, brun ténébreux et le costume lui allait à merveille.
– Cassie? Balbutia l’avocat tout en souriant.
– Aaron?
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